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Geneworld.net>Fan-fictions>My_wing>Le jeu de l'hirondelle

00 - PAR MY_WING

Le corps avait été retrouvé à même le sol, le cou qui était mis à nu par un décolleté plongeant portait de grossières marques ressemblant vaguement à une paume et des doigts, sa langue pendait bêtement hors de sa bouche comme lorsqu'on mimait un mort et ses yeux agrandis par la terreur ne reflétaient rien d'autre que le vide, fixant le plafond sans le voir.
Mme Freeman était ce qu'il y avait de plus mort en cette pièce. Elle était devenue un simple objet en cette pièce.

C'était son mari qui l'avait retrouvée ainsi en rentrant d'une conférence. Un cadeau peu commun en sachant que ce jour-là était son 49ème anniversaire. Par réflexe, il avait appelé la police qui, à peine arrivait sur le lieu du crime, avait commencé son travail minutieux.

<< - Vous n'avez touchez à rien, n'est-ce pas ?, commença l'inspecteur Dubreuil.
- Rien, répondit sans hésiter M. Freeman.
- Absolument rien ?, dit Dubreuil se faisant plus insistant que jamais.
- Rien, répondit une nouvelle fois le nouveau veuf.
- Et où étiez-vous au moment du crime ?
- A une conférence pour le travail.
- Vers quelle heure a-t-elle débutée ?
- Hum... >>

Il hésita quelques secondes, son visage s’assombrissant. Des perles de sueur lui roulaient le long des tempes et quelques unes s’échouaient sur le parquet. L’horloge résonna dans la maison entière tant le silence était lourd. Il répondit enfin d'une voix rauque :

<< - Il devait être 15 h, pas plus.
- Vous ne savez plus exactement l'heure le début de la conférence ?, demanda suspicieusement l'inspecteur.
- Si, si. Je suis seulement quelque peu déboussolé, c'est tout.
- C'est vrai, qui ne le serait pas, n'est-ce pas ? Je vous le demande ?, fit-il d'une voix mielleuse légèrement ironique.
- Le meurtrier ?, hasarda M. Freeman. >>

Un rire guttural envahit la pièce donnant la chair de poule au petit homme gras et chauve. L'inspecteur Dubreuil avait un rire à faire froid dans le dos plombant l'ambiance de la pièce qui était déjà lourde à cause du cadavre de la pauvre femme. La rendant complètement insoutenable.

<< - Il paraît que votre femme batifolait souvent ?, dit soudainement Dubreuil d'une voix froide et complètement détachée. Vous deviez être jaloux de ses jeunes conquêtes, non ?
- Comme tout mari, je l'étais., hésita M. Freeman apeuré. >>

Dubreuil le détailla. Le petit homme tremblait de la tête aux pieds et les grosses gouttes continuaient de couler. Le bruit insolite que produisaient les dents s'entrechoquant s'amplifiait et le silence qui régnait dans la pièce tordit le ventre M. Freeman.

<< - Anxieux ?, demanda Dubreuil d'une voix sourde. Aurais-je touché un point sensible ?
- Mais pas du tout ! Vous vous trompez, ce n'est pas ça !, cria t-il en regardant dans tous les sens comme fou, Elle ne m'a jamais trompé ! >>

Et il courut vers le corps inerte de sa femme en répétant des " jamais " désespérés tout en la serrant dans ses bras.
L'inspecteur eut un élan de rage à cette vue mais une main sur son épaule le força à reprendre son calme.

<< - Tu y as été fort cette fois-ci. Je peux savoir ce qu'il t'a fait pour que tu sois comme ça ? demanda ironiquement Chrimelt, son coéquipier.
- Rien, il ne m'a rien fait. Je suis à cran, c'est tout. On vient tout juste d'arrêter l'autre fou furieux qui a tué sa famille qu'on nous colle une autre affaire sur les épaules. Ca va finir par me rendre moi-même fou ce travail. >>

Chrimelt était beaucoup plus vieux que lui, au tout début il avait pris Dubreuil pour un crétin fini. Mais avec le temps il avait appris à connaître l'autre et son enfance mouvementée. Et il avait fini par s'attacher au jeune homme. Il le protégeait maintenant comme un père, père que le petit n'avait jamais eu.

<< - Viens on va prendre l'air, dit Chrimelt d'une voix chaleureuse, Après on ira voir si l'enquête a progressé. Ok ? >>

Dubreuil hocha favorablement la tête et murmura un " Ok ". Et la main, jusque là restée timidement sur l'épaule, prit le dos de Dubreuil pour l'aider à marcher droit malgré la colère.

__________________________________

Le vent frais s'engouffrait dans leurs cheveux faisant voleter quelques mèches. La respiration du jeune homme se fit plus calme.

<< - Ca va mieux ? demanda Chrimelt doucement, coupant ainsi le silence qui était de plus en plus étouffant.
- Oui, murmura Dubreuil indifféremment.
- Tu veux qu'on reste un peu ici ou tu préfères qu'on aille voir ce qu'il en est pour Mme Freeman ?
- J'aimerais mieux ne jamais savoir pour cette femme, fit-il en crachant le dernier mot. >>

Et le silence reprit, plus étouffant que jamais.

___________________________________

Les policiers remballèrent le matériel.

Les preuves qu'ils avaient retrouvées ne menaient qu'à un seul suspect : M. Freeman. Les gants qui avaient servi tuer Mme Freeman étaient les siens et ne portaient que ses empreintes. Personne ne l'avait vu de la journée et le fait que sa femme ait eu de multiples amants n'arrangeait pas son cas.

Mais malgré tout cela ils ne pouvaient encore le condamner, son alibi tenait encore. L’enquête se passerait maintenant dans les bureaux, à enchaîner coup de fil sur coup de fil, à accumuler preuve sur preuve.

<< - Eh bien, bonne soirée M. Freeman., fit Chrimelt s’avançant vers la sortie.
- Vous de même, M. Chrimelt., répondit le petit homme gras en s'essuyant le front avec un mouchoir décoloré. >>

Le policier remit son chapeau et finit de fermer son caban, salua une dernière fois puis partit à la suite des autres. Dubreuil jusque là resté dans l'ombre grogna un << Adieu >> qui fit sursauter M. Freeman qui l'avait complètement oublié

<< - A.. Adieu ? Bégaya t-il. >>

Mais l'autre ne répondit pas et le dépassa. Quand il quitta le hall d'entrée, il se retourna une dernière fois et ajouta d'une voix sans timbre :

<< - Faites attention à vous. Un malheur est si vite arrivé. >>

Freeman détailla le profil de Dubreuil et geignit.

<< - J'étais sûr d'avoir déjà vu votre visage quelque part..., murmura t-il. >>

Les yeux de Dubreuil s'agrandirent sous la surprise. Mais il n'eut pas le temps de répliquer, Chrimelt l'appelait. Il serra les dents, dirigea son regard haineux vers Freeman et il partit le pas traînant.

_________________________________

<< - Es-tu prêt à mourir ?, demanda une voix glacée >>

La masse recroquevillée dans le coin de la pièce gémit. Elle apporta ses mains à sa tête et cria. L'autre rit.

La masse trembla vivement, le frisson remontant violemment le long de ses vertèbres.

<< - Tu auras beau crier personne ne viendra. Tu dois bien regretter d’avoir acheté une maison si coupé du monde, non ?
- Comment pouvez faire ça ? Comment pouvez-vous seulement penser à tuer quelqu'un ?, fit-il d'une voix tremblotante.
- Ca s'apprend mon vieux. C’est plutôt pratique de faire mon métier. Sur le terrain, on apprend beaucoup sur les crimes parfaits. Mais c'est trop tard maintenant. Pas de pitié dans ce milieu en espérant que t'apprennes cette leçon là où tu seras après. Debout ! >>

La masse hésita, mit ses mains par terre pour se lever mais se ravisa et recommença à trembler de la tête aux pieds.

<< - Debout, j'ai dit !, cria t-il >>

La masse gémissait des " Pourquoi " et l'autre n'en put plus. Il mit son flingue contre la tempe de la masse.

<< - Tu m'as pas entendu ? Debout !
- Je me lèverai pas ! fit la masse avec une voix penchant vers les aigus.
- A ce que je vois tu ne veux pas me faciliter la tâche ? D'accord, j'peux encore une fois me taper tout le boulot. Ta femme non plus n'a pas voulu rester calme quand je l'ai étranglé. >>

Le visage rond de la masse se tourna vers l'autre, il avait réussi à attirer son attention.

<< - Elle s'est débattue jusqu'à la fin et quand elle a arrêté de bouger je me suis sentie si bien. J'étais délivré. Cette idiote voulait tout te raconter pour ses amants et comme j'en faisais parti ma prochaine promotion serait certainement tombée à l'eau. Et ma femme ? Mon petit garçon ? Qu'aurait-il pensé de moi ? Il fallait que je la supprime. Et je l'ai fait. Tes gants étaient déposés sur la petite table dans le salon mais ça ne suffisait pas. Et puis j'ai aperçu des gants élastiques, ceux transparents qu'on utilise qu'une fois pour nettoyer. Quand elle a vu que je les enfilais elle m'a demandé ce que je faisais et...
- Taisez-vous ! hurla la masse. >>

Mais l'autre continuait inlassablement son discourt sans fin. La masse se leva et l'autre l'immobilisa un rictus hideux retroussant ses lèvres.

<< - Tu as enfin décidé de te lever. Je n'y croyais plus. >>

La masse laissa couler un flot de jurons divers.

<< - C'est pas tout ça mais l'heure tourne et ta lettre attend sagement depuis un moment maintenant. Et n’oublie pas de m’en envoyer une pour me dire comment est l’enfer., conclut l'autre son rire terrifiant s'amplifiant pendant que la masse marchait vers la mort. >>

____________________________________

L'inspecteur Dubreuil sourit. Il avait été contacté une demi heure auparavant, la sonnerie stridente le tirant du sommeil lui et sa femme. Ses collègues avaient retrouvé le cadavre de M. Freeman un revolver à la main, une lettre dans la poche de son trois pièce.

Il s'était apparemment suicidé.

Pas de trace d'effraction, pas de lutte, pas d'autre empreinte et une lettre dans laquelle il expliquait pourquoi il avait tué sa femme. Juste un cadavre ensanglanté, un pistolet lui ayant appartenu, une lettre d'excuse et du sang en abondance.

Un meurtre parfaitement déguisé. Tout simplement parfait.

Une phrase pleine de vérité lui revint à l'esprit : les policiers sont bien plus pervers et sadiques que les criminels.

Il rit.

<<- Ca va, chéri ?, demanda sa femme depuis la chambre à coucher.
- Oui, tout va bien., fut sa simple réponse.>>

Il releva la tête, un sourire carnassier s’ajoutant à son reflet. Bien sûr que ça allait, ça n'aurait pu aller mieux.
Il n'avait plus qu'une chose à faire maintenant : attendre, attendre sa lettre.

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